Inspiration et mal-être
Conférence inspirante ce matin au CNE du philosophe et psychanalyste Pierre-Henri Castel sur l’évolution de la santé mentale de notre pays. Ou comment se créent au fil des époques ce qu’il appelle les idiomes de détresse, soit un discours du mal-être convenu, socialement acceptable, indexé sur le contexte économico-politique de l’époque ou d’une communauté.
Acédie chez les moines du Moyen-Age, neurasthénie au débuts du XXème siècle, dépression, troubles musculo-squelettiques et pathologies anxieuses diverses aujourd’hui, sans parler des risques psycho-sociaux à l’origine de nouvelles pathologies récemment advenues dans le monde du travail…
Je ne reviendrai pas ici sur le contenu des propos passionnants de notre orateur, tels qu’on les retrouve sur la toile au fil de ses écrits et vidéos. Me contenterai seulement de suivre l’inspiration d’un paradoxe, riche en questionnement :
Pourquoi notre contexte d’individualisme et de solitude corrélée ne génère-t-il que des expressions de mal-être socialement banalisées et convenues ? Quitte à être mal, autant créer des versions individualisées de notre mal-être, non ?
Des formes d’expression nouvelles, des comportements disruptifs ou carrément perturbants, des symptômes inédits tels qu’on les adore dans nos films et séries : Thelma et Louise, Falling down, Breaking Bad, Homeland, Sons of Anarchy, et autres florilèges de catharsis hautement délectables.
Bref, un langage unique, à doser évidemment pour chacun, une parlure singulière, aussi rare que précieuse qui rendrait caduque la prescription automatique du médecin-refuge, grand pourvoyeur d’antidépresseurs et autres anxiolytiques à fonction de banalisation.
S’écouterait alors un idiome de souffrance à recueillir précieusement à travers des propos, des émotions, des attitudes authentiques…. Un élixir d’être à analyser pour mieux en goûter le sens, ou encore une œuvre au noir qui parlerait aussi et encore d’inspiration.